Fin 2018 – début 2019, le mouvement des Gilets Jaunes a marqué une volonté de davantage de justice sociale et d’écoute dans la prise de décision.
Tribune
Le mouvement des “Gilets jaunes” a remis au premier plan la question de la participation. Le mouvement lui-même demande la mise en œuvre du référendum d’initiative citoyenne.
Cette actualité exprime une aspiration à exercer plus directement le pouvoir.
Cette tribune a également été publiée dans La Gazette des communes du 21 janvier 2019
Sur le terrain, les consultations ou les concertations dynamisent notre vie démocratique. Elles présentent cependant une limite : elles offrent un espace d’expression à tous les points de vue ou éclairent le débat, mais la décision ne revient pas directement aux citoyens.
En complément de ces démarches, une forme de démocratie directe existe bel et bien. Plus de 80 collectivités, dont Paris ou le Département du Gers, l’ont déjà adopté. Il s’agit du budget participatif.
Une réalité pour 6 millions de Français
Le budget participatif s’appuie sur un principe simple : « Vous décidez, nous réalisons ». À partir d’un montant alloué par la collectivité, les citoyens proposent des idées d’intérêt général. La collectivité s’assure qu’elles sont de sa compétence et peuvent être financées (par l’investissement). Les projets recevables sont soumis au vote et, enfin, ceux votés sont réalisés.
Ces cinq dernières années, plus de 6 millions d’habitants de grands centres urbains comme de petites communes rurales ont pu, grâce au budget participatif, se réapproprier l’espace public concrètement, œuvrer à l’amélioration de leur cadre de vie, accroître les espaces de respiration.
Ils ont aussi conçu des espaces de production locale, d’échanges ou de loisirs ; ils ont développé les énergies renouvelables ou les mobilités alternatives ; ils ont encore agi par solidarité pour l’inclusion des sans-abris ou l’intégration des migrants par exemple.
La démocratie par la pratique
Au-delà des projets, le budget participatif a donné à ces Français le pouvoir d’agir sur le destin collectif de la cité. Cette citoyenneté par la pratique s’exprime déjà par ailleurs.
Le citoyen peut agir au quotidien, en tant que consommateur, pour préserver la planète en achetant bio par exemple, sur l’économie locale en privilégiant des produits régionaux. Électeur, il ne peut agir directement. Il place le destin collectif aux mains de ses représentants, à l’intervalle de 5 à 6 ans.
Cette durée des mandats politiques est indispensable pour assurer la gouvernabilité. Cependant et ainsi que le rappelle Pierre Rosanvallon dans « La démocratie inachevée », ce temps long creuse la distance entre représentant et représentés. C’est pourquoi, il nous invite à l’invention de nouvelles formes de participation, au côté des formes traditionnelles.
Un outil démocratique et un réel pouvoir
Le budget participatif en est une. Sa finalité n’est pas de dénier la légitimité des représentants ou de réduire leur pouvoir mais bien de régénérer le lien avec les citoyens. Le budget participatif redonne de la force à la parole politique par la preuve : ce que les citoyens décident, le politique le réalise.
La multiplication des budgets participatifs a fait émerger la question de la sincérité de la démarche, vue par certains comme un simple argument électoral. Aussi, il est du devoir de ceux qui décident du budget participatif d’en faire un réel outil démocratique et, pour y parvenir, donner un réel pouvoir aux citoyens.
Bilan | Répondre aux nouveaux enjeux de la citoyenneté
En maintenant ce cap, le budget participatif pourrait devenir, au côté des élections traditionnelles, un exercice démocratique complémentaire, signant un contrat nouveau entre élus et citoyens. Le contexte actuel y est favorable et le contexte à venir le sera plus encore. L’exercice démocratique des nouvelles générations tend à privilégier les engagements pragmatiques et les enjeux concrets, ainsi qu’un le fonctionnement en réseau et une relation horizontale, au détriment des hiérarchies.
Autant d’éléments qui appartiennent à l’ADN du budget participatif et qui doivent inspirer toutes celles et ceux qui le mettent déjà en œuvre. L’enjeu est de formuler une réponse toujours plus pertinente à l’aspiration d’une citoyenneté de plein exercice.